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LA TROISIÈME ESPÈCE
Chapitre 23
SINGAPOUR
Dans le salon VIP de Paya Lebar airport, aéroport de Singapour.
— Alors, qu’a préconisé votre ami Howard ? demande Théo légèrement inquiet.
Einar, voyant le visage tracassé de son compagnon de route, lui met une main sur l’épaule.
— Mon cher compagnon, aucun souci. Howard nous envoie encore du renfort que nous prendrons à Colombo, sur l’île de Ceylan[1].
— Ils seront combien ?
— Trois de plus, attendez, j’ai les noms cette fois...
Il sort un papier sur lequel il a griffonné les noms.
— ...Paul Méchain, Karl von Kirsch et Amar Aït‑Idir.
— Eh ben ! Un français, un allemand et un kabyle !... Un mélange magnifique à notre époque.
Einar se laisse aller à rire, ces derniers temps ont été plutôt stressants, et la gentillesse de Théo, quand c’est le cas, est délassante.
— Et ce n’est pas fini, Howard m’a dit qu’il allait contacter un homme que je ne connais pas et qui a peut-être le moyen de pouvoir nous permettre d’aller en bateau de La Réunion aux Kerguelen et alentour si besoin.
— Qui ça ? demande Théo, toujours curieux.
— Aristote Onassis !
— Allons, allons, réveillez-vous, mon ami !
Samy est penché sur Théo, qu’il tient dans ses bras.
— Que s’est-il passé ?
— J’arrivais, heureusement, et vous êtes tombé... mais pourquoi ?
Théo pose une main sur son front.
— Je ne sais plus... Ah si ! Einar vient de m’annoncer que...
Il se tourne vers Einar qui le regarde, souriant.
— C'est donc vrai ?
— Oui, heureusement que Samy arrivait derrière vous. En effet... c’est bien Onassis qui va peut-être pouvoir nous dépanner.
— Mais comment ? insiste Théo.
— Il a son yacht, un quatre-vingt-dix-neuf mètres, dix-sept cabines de luxe...
— Une chaise ! Par pitié une chaise ! joue théâtralement Théo en tournant la tête de chaque côté, le dos de la paume sur le front.
Toujours dans le salon VIP de l'aéroport, la petite troupe patiente durant l'inspection de routine de leur avion et son ravitaillement.
— Ce sandwich était vraiment délicieux, mademoiselle.
La serveuse s’éloigne de Théo qui se retourne vers Einar.
— Mais dites‑m’en plus, comment se fait-il qu’Aristote Onassis puisse connaître Howard Hughes ?
— C’est très simple, par leurs affaires. Et en l’occurrence, Howard m’a dit que c’était par le biais de la TWA chez qui il a encore des contacts. Et justement Aristote avait besoin d’avions, alors...
— Bien, bien. Et alors, nous serons fixés quand au sujet du paquebot ?
Einar regarde sa montre.
— Voyons... d’ici une heure, je pense.
Einar dans la cabine de pilotage, vient aux nouvelles avant le décollage.
— Vous avez bien inspecté la piste cette fois, commandant ?
— Oui, aucune crainte, j’avais d’ailleurs donné le portrait-robot à la police australienne.
— Et ? fait Einar, les yeux grands ouverts.
— Ils ont arrêté un individu. Ce que vous craigniez est tout à fait et malheureusement exact. La secte The divine union était derrière cet attentat.
— J’en étais sûr ! tape‑il dans ses mains.
— Et c’est confirmé, vos trois collaborateurs nous attendent déjà à Colombo. Allez vous asseoir, nous décollons.
Samy et Théo, face à face, sont de nouveau prêts à en découdre. Un échiquier les sépare alors que le Lockheed Constellation vibre doucement sous leurs pieds, roulant sur la piste de Paya Lebar. La nuit tombe lentement sur Singapour dans un dégradé de bleu et d’orange embrasant paisiblement l’horizon. Les phares de piste découpent des halos lumineux dans la pénombre.
Samy vient d’installer le plateau d’échecs sur la table pliante entre leurs sièges, les pièces aimantées posées. Le bourdonnement des moteurs accompagne le début de ce “combat”.
Alors que la nuit est cette fois presque finie, cette troisième partie tire à sa fin, le silence règne, le professeur, seul spectateur, apprécie la bataille.
Samy bouge enfin son cavalier avec une concentration tranquille.
— Échec, dit-il d’une voix douce.
Théo se penche en avant, fronçant les sourcils.
Le souffle de l’avion faisant claquer les rideaux contre la paroi, et une vibration secouant légèrement le plateau ajoute à l’agacement de Théo.
— Quoi ? Non... ce n’est pas encore possible ! proteste-t-il en donnant un petit coup sur la table. Je... je n’ai même pas vu ce coup !
Samy hausse un sourcil amical, son regard brillant dans la pénombre.
— Vous savez, cher ami, votre jeu s’améliore, malgré tout. Cette dernière partie a presque été à votre avantage.
Théo, soufflant et gonflant les joues, fait mine de bouder, mais au bout de quelques secondes, un petit rire s’échappe de ses lèvres.
— Je sais, bon... d’accord. Vous gagnez cette énième partie. Mais la prochaine fois, je vous aurai !
Samy sourit, toujours amusé du caractère déconcertant de son vieil ami. Ce mélange d’orgueil et de gentillesse naïve.
— La prochaine fois, oui, j’espère vous voir l’emporter enfin, mon ami.
Théo a une moue boudeuse sur le visage, mais l’œil pétillant ; il regarde par le hublot les lumières de la ville qui approche devant eux.
— Oui... oui... je ferai plus attention.
Le professeur Meier se lève.
— Je suis ébloui par vos jeux, et croyez-moi, cher Théo, vous ne déméritez absolument pas !
Le Constellation semblant commencer sa descente, tous s’attachent à leur fauteuil avant que l’hôtesse n’arrive.
— Messieurs, nous allons atterrir à Colombo airport...
[1] Aujourd’hui Sri Lanka.
(chapitre 24, mardi 11 novembre 2025 “Colombo”)