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Imaginaire n°644
mercredi 8 mai 2024
inspiré par
“Les voyages de Gulliver”
de Jonathan Swift
 
Swift reste un précurseur dans l’art de la critique politique, mais il n’y a pas que Laputa.
 
LALISÉE
 
François était perché dans un arbre, son arbre. Quant à son ami de toujours, Samuel, il avait préféré rester sur le quai de Seine, délaissant quelques instant les branches accueillantes de son arbre à lui, mitoyen de celui de son ami.
L’eau scintillait au soleil de mai, les clapotis joyeux du fleuve donnaient à cette journée qui débutait, un air plaisant. Car depuis que les Nerv’s[1] étaient au pouvoir, avec le président, dans son entourage ou “en bas”, la joie et l’insouciance étaient rares.
— C’est à quelle heure que tu es convoqué, François ? s’enquit Samuel.
— Laisse tomber, je ne vais pas y aller. Leur sélection, ils peuvent se la carrer profond.
— Chhhhh.
Samuel s’aperçut qu’un fonctioneux, sbire sentencieux du “président” arrivait. Il marchait en ânonnant des formules administratives, soliloquant tout en avançant vers les deux amis, qui firent silence.
Ayant la tête baissée tout en récitant les articles d’un quelconque règlement nouveau, il ne fit nullement attention aux deux voteux.
Pourquoi d’ailleurs se serait-il intéressé à eux ? La caste des “voteux” n’est utile que pour voter lorsqu’on le lui demande. Évidemment le résultat est déjà décidé par le “président”, mais il faut bien respecter les convenances habituelles.
Le fonctioneux, lui, est vraiment utile ! Car le président s’appuie sur cette classe pour régir le pays dans tous les aspects de la vie.
Tournant sur sa gauche au lieu de la droite, le fonctioneux, qui n’avait pas fait attention, se retrouva en un instant dans l’eau froide de la Seine.
Ses appels au secours n’y firent rien. François et Samuel le regardaient se débattre, essayant de s’agripper au bord pierreux.
Deux fonctioneux bleus, ceux chargés de la sécurité publique républicaine, accoururent, mais trop tard. L’autre avait disparu dans les profondeurs.
L’un des deux “bleus”, se retourna vivement vers Samuel, d’abord.
— Dis, espèce de voteux réfractaire, tu n’aurais pas pu l’aider au lieu de rester là sans rien faire ?
— Monsieur, je ne sais pas nager, tenta-t-il de s’expliquer.
Le bleu, sourd à sa réponse, se précipita sur lui avec son collègue. Il lui mit les menottes sans rien ajouter, mais ne s’apercevant pas de François dans son arbre, silencieux et en train de filmer la scène avec son IP[2].
Samuel ne protesta pas, à quoi bon puisque de toute façon les bleus ont une voix prépondérante. Quoi qu’ils puissent faire, les bleus sont toujours soutenus par le système des Nerv’s, et par le premier d’entre eux, le président.

***

Les parisiens se sont révoltés depuis qu’un des leurs, Samuel, fut jugé en comparution “tout-de-suite”, soit un quart d’heure après son arrestation, et envoyé au bagne de Sarcelles dans l’heure.
— Julien ! Fait gaffe.
Une grenade paralysante roulait vers le jeune révolté. Heureusement, François l’avait vu. En un clignement d’œil, le jeune homme sauta de l’autre côté de la barricade, vers son aîné qui l’avait prévenu à temps.
La grenade explosa.
— Tiens, ça explose aussi ? demanda-t-il.
— Tu sais, Julien, “paralysant” c’est juste pour les infotainment. Ça fait “bien”.
C’est quand la poussière fut retombée que les défenseurs de la barricade s’aperçurent que Louisa manquait. La toute petite fille, pourtant, jouait auparavant avec son doudou à côté de sa mère.
— Où est Louisa ? criait sa mère.
— Attends Pauline, calme-toi, on va voir.
Mais le calme de François n’y put rien. Car c’est Julien qui alerta le premier.
— Là !
Les yeux de la vingtaine de barricadiés se tournèrent ensemble dans la direction que montrait le jeune homme.
Un petit corps, dans une mare de sang, déchiqueté, gisait sur le bitume.
— Louisaaaaaa !
Comme folle, la jeune femme se rua sans qu’on puisse l’arrêter, sur la dépouille de sa fille. Une balle la transperça entre les deux yeux.
Le silence s’abattit d’un coup sur ce carrefour, au croisement des boulevards Saint Michel Rocard et Saint Germain des Présidents. Une ombre s’avançait lentement, recouvrant inexorablement le quartier. Le froid se fit lorsque le soleil fut entièrement caché par l’immense vaisseau qui stoppa alors à cinq cents mètres du sol, plongeant entièrement la capitale dans la pénombre.
Ils en avaient déjà entendu parler de “ça”, mais ne l’avaient jamais vu. Et elle était là ! La volante île présidentielle (VIP), que l’on appelait aussi “Lalisée”.
Alors une voix se fit entendre à tous sur l’ensemble du territoire parisien, une voix qu’iels n’avaient pas entendu depuis le résultat du dernier suffrage obligatoire. Une voix chaude, claire, impérieuse, mais compréhensive. Une voix qui voulait les rassurer.
— Je vous ai compris !

[1] Les Nouveaux élus républicains visionnaires.
[2] “Intelligence Personnelle”, appareil qui sert un peu à tout et surtout à être informé correctement pour être un bon voteux. L’IP est aussi utile, à l’occasion, pour rester en contact vocal avec ses familiers et sa hiérarchie.