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Au commencement était la maison. Tout commence toujours par une maison. Celle qu’on acquiert, celle dont on rêve, celle qu’on quitte. Tout a commencé lorsque mes parents ont décidé d’emmé- nager dans cette maison-là. Le choix de la maison reflétait seulement le choix de la ville, pas un choix de vie. Et le choix de la ville intimement lié à l’image de cette ville dans l’imaginaire de mon père. Ville bourgeoise, villégiature sans âme, sans ambiance ni histoire, pour nouveaux riches ou vieux possédants. Les années soixante et leur cortège de confort facile, de promotions sociales sans scrupules ni moralité... tout fout le camp, ma bonne dame ! Mais de la faute à qui ? Mieux vaut ne pas se poser trop de questions. D’ailleurs ils sont tous trop occupés à courir après l’argent, le pouvoir, et les simulacres de l’amour. Les questions ne servent à rien. Il sera bien temps d’y répondre lorsqu’ils seront vieux, s’ils y arrivent. Bouffés avant l’heure par leur cancer, leurs excès, leur bêtise, leur prétention à s’imaginer que tout cela va durer aussi longtemps qu’ils le souhai- tent... Pourquoi le corps cesserait-il d’obéir ? Pourquoi se vengerait-il des folies commises au nom du plaisir ? Est-ce vraiment le plaisir ? Qu’importe ! Prenons ce qui est à prendre... et tant pis pour les dommages collatéraux.
La famille, côté officiel indispensable à l’image de marque fera partie du tableau. Et du décompte des dommages collaté- raux. Les névroses ? Il y a la psychana- lyse pour cela. C’est tellement chic d’avoir son psy. Certains y vont sans en avoir besoin — du moins le croient-ils — alors on a pas à se cacher. Cela fait partie du train de vie comme prendre des leçons de piano ou aller deux fois la semaine à son club d’équitation ou de tennis. [...]