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LA CHANCE
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NO BORDERS !
Treize Nouvelles

Quatrième nouvelle
FERMER PAR PEUR

Bureau de la nouvelle cheffe de la police des frontières, Carrie Smith[1].
12 mars 2018.
Elle claque la porte de son bureau, elle est dans un état d’énervement total, comme jamais ses collaborateurs ne l’ont vu.
— Bordel, Henry, on va faire comment avec Mogul[2] ! Je ne veux pas d’un Dallas[3] à la mexicaine. Ces beaners[4] me les pompent.
Henry Monroe a le visage défait, certes, il connaît l’intransigeance de sa cheffe, mais il ne s’attendait vraiment pas à prendre un savon dès ce début de semaine.
— C’était quoi ce groupe d’activistes anarchistes “Tomolov” qui ont pu chanter à San Diego... ?
— Pardon cheffe, c’est “Molotov”[5]...
Véritablement hors d’elle, les mains sur son bureau, elle répond à son assistant.
— QUOI... Molotov ou Tomolov ?... ça reste bien des gauchistes... mexicains en plus !
— Madame, c’est qu’ils avaient reçu l’autorisation par l’USCIS[6] de jouer en public sur notre sol. Ensuite le CBP[7] a bien contrôlé leurs visas.
— Et le côté fiscal, on a vérifié ?
Bien lui en prit, Henry Monroe avait prévu que la cheffe par intérim de la police des frontières allait lui chercher des poux à propos de ces artistes dont Fox News avait parlé à leur manière la veille.
Il ouvre le dossier qu’il avait sous le bras, au plus grand étonnement de Carrie Smith.
— Oui, l’IRS[8] a bien enregistré leurs versements, ils ont aussi acquitté la California State Income Tax, la Withholding Tax... jusqu’à la Sales Tax. Ils ont tout payé.
— C’est pas normal !
— Qu’ils n’aient pas tout réglé ?
— J’en suis certaine, ce sont des assistés mexicains. Et puis, personne ne paie tout, comme ça, de son plein gré.
Henry Monroe regarde sa cheffe d’un air dubitatif.
— Ben moi...
Il s’interrompt, en pensant peut-être que non seulement son cas personnel n’a rien à faire à cet instant, et qu’en plus ça risque d’énerver encore plus la cheffe de la police des frontières.
— Ils sont repartis chez eux ?
— Oui... en fait, l’info diffusée datait de novembre dernier.

Le lendemain, alors que Donald Trump vient faire une visite sur la construction de “son” mur anti-migrants.
Carrie attend sur la piste de l’aéroport de San Diego, où Air Force One va bientôt atterrir. Elle se penche vers Rodney Scott, le chef de la patrouille frontalière du secteur de San Diego. Elle lui chuchote quelques mots.
— Dites, Rodney... vous avez des infos sur Molotov ?
Il se retourne vers elle, l’air choqué.
— Mais je ne sais pas comment on fait un de ces engins, madame !
— Shhhhtt, non, je vous parle du groupe de rock d’anarchistes mexicains.
Il secoue la tête de droite à gauche.
— J’écoute pas.
— Mais “ils” en ont parlé !
— Qui ?
— Fox News, qui voulez-vous d’autre ? Il croise ses mains sur sa poitrine, stoïquement.
— Je regarde pas.
Elle relève la tête, inquiète soudainement de la déloyauté possible de son subordonné. Elle le regarde en essayant de déceler un signe de gauchisme. Quelque chose, un clignement d’œil, un pincement des lèvres, qui trahirait son obédience wokiste.

Trump, conduit dans The Beast[9], arrive au sud de San Diego, là où l’on travaille sur la construction mégalomane d’un mur qui est destiné à interdire aux Mexicains et autres migrants de venir sur le sol des USA.
Diego-Hernández López, un ouvrier mexicain qui travaille sur cette portion, à l’arrêt durant “la” visite, se penche vers l’oreille de sa copine Ana-Sofía Delgado-Ruiz.
— Plus le mur sera haut et long, plus on pensera qu’on est puissants.
Elle lui lance un regard étonné.
— Eh bien oui, s’ils ont besoin de ça pour se sentir en sécurité, c’est qu’on est forts nous, assez forts pour qu’ils aient besoin de ce machin... qui n’arrête rien, ou si peu.
— En fait, tu sais à quoi sert ce mur pour de vrai ? questionne Ana-Sofía.
— Ben... non.
— À empêcher les Américains de sortir et d’entendre ou voir autre chose.
Ils se mettent à rire.

Carrie Smith laisse partir le convoi présidentiel et ses nombreuses voitures et engins militaires pour protéger “l’homme le plus puissant du monde”. La poussière finit par retomber, comme le silence.
Le soleil commence à décliner. Les collines au loin, de l’autre côté du mur en cours de construction, bercées par un léger vent, prennent les derniers rayons chauds.
Carrie se redresse, voyant ce paysage si paisible, elle se tourne vers son assistant, Henry Monroe.
— Vous voyez, Henry, s’il n’y avait pas l’obligation de nous protéger, nous aurions pu aller sur ces collines.


[1] Nom fictionnel.
[2] Surnom donné à Donald Trump par le service secret durant son premier mandat.
[3] Comparaison simpliste à l’assassinat de John Kennedy le 22 novembre 1963, à Dallas.
[4] Insulte caractéristique des racistes américains envers les mexicains, supposés manger trop de haricots.
[5] Groupe mexicain de rap-rock et rock alternatif engagé politiquement, très connu pour ses textes provocateurs.
[6] L’USCIS (U.S. Citizenship and Immigration Services) examine la demande, vérifie les qualifications de l’artiste ou du groupe, et émet une pétition approuvée.
[7] À l’arrivée aux États-Unis, CBP (Customs & Border Protection) contrôle l’entrée et s’assure que le visa correspond à l’activité (concert, tour-née, festival, etc.).
[8] Services liés aux taxes et à la fiscalité : Internal Revenue Service.
[9] Surnom de la Cadillac limousine spécialement conçue, blindée et équipée de technologies de protection avancées (résistance aux balles, produits chimiques, explosions, etc.).

(samedi 6 décembre 2025, quatrième Nouvelle “Fermer pour surveiller”)