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Treize Nouvelles
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FERMER POUR SURVEILLER
Douzième année du règne de l’empereur de Chine Qin Shi Huangdi. L’un de ses généraux, Meng Tian, était en ce doux printemps sur la muraille après de nombreuses attaques des Xiongnus sur cette portion, heureusement unifiée au reste du long mur sous le règne de cet empereur.
Le général est inquiet, il scrute l’horizon du haut de la tour. Là où il avait fait installer l’une des balistes quelques jours auparavant.
— Capitaine Chen Bo.
— Oui mon général ?
— Regardez là-bas, ne serait-ce pas de la poussière que des chevaux font voler ?
Le capitaine se penche en essayant de distinguer ce que le général vient de découvrir.
— Je ne vois rien, mon général.
Troublé, il vérifie s’il a bien vu.
— Cela a disparu. Mais peu importe, vous mettrez une escouade d’archers, vos meilleurs éléments sur chacune des tours de Jinshanling à Simatai.
La nuit est fraîche en cette fin de jour Gēngzǐ. Le général se repose au pied du mur, sous sa tente, dans le petit campement installé à son arrivée. Tout est calme.
Non loin de Hán Bó, archer de la garde d’élite qui était en faction cette nuit-là, un bruit.
“Crac”
Immédiatement, le soldat lance le signal d’alarme sourd grâce au huǒlóng[1] et trois coups frappés contre une pierre.
Aussitôt, en haut de la tour, Sūn Yǐng, de l’escouade de nuit, se lève, et regardant en bas, s’aperçoit de la petite lumière diffusée discrètement.
— Caporal... caporal.
Ce dernier, Gāo Lín, qui ne dormait que d’un œil, se met debout.
— Qu’y a-t-il archer ?
— L’alarme... regardez.
— Général, général.
Lú Sōng, son vieux serviteur, le plus zélé, secoue son maître.
Réveillé, il se met sur ses coudes et sourit au vieil homme.
— Qu’y a-t-il Sōng lǎo[2] ?
— Il y a de l’agitation sur la tour.
— Caporal Gāo Lín, vous m’avez réveillé pour rien...
Ce dernier, la tête basse, est sincèrement désolé.
— ...Mais avec ces Róng[3], il faut bien que je m’attende à mal dormir. Vous avez fait votre travail, caporal. Puisque ma nuit est écourtée, je vais en profiter pour faire une inspection jusqu’à Simatai.
Plusieurs heures plus tard, la troupe du général, composée de sa garde rapprochée et de quelques serviteurs, s’approche de la tour non loin de Simatai.
Un éclaireur se présente, essoufflé.
— Général, j’ai vu un nuage de poussières là-bas, au fond de cette vallée.
— Tu as pu en voir plus ?
— Non, mais j’ai bien vu le nuage et des bruits de roues sur le chemin qui vient par-là.
Bien cachés derrière de gros rochers, le général et l’éclaireur regardent en silence dans la direction indiquée.
— Il n’y a rien, regarde toi-même.
Le soldat paraît embêté.
— Je vous assure général que j’ai bien vu et bien entendu ce que j’ai dit.
Son supérieur lui tape sur l’épaule.
— Allons, allons, tu as très bien fait. Ces Xiongnus sont retors.
À la nuit tombée, de retour à son campement de base, le général semble inquiet.
Son vieux serviteur vient lui porter une collation.
— Maître, je vous vois pensif, sommes-nous en danger avec tous ces barbares étrangers, ces fauteurs de troubles ?
Silencieusement, il se tourne vers Lú Sōng. Il le regarde longuement.
— Tu me suis depuis si longtemps, tu sais bien que je préfère être sur mes gardes, surtout avec ce peuple de pilleurs. Sois tranquille, la muraille est là pour que nous puissions les surveiller.
Sūn Yǐng, qui est de garde cette nuit-là en haut de la tour principale, observe la nuit du mieux possible. Heureusement la Lune est pleine et il peut voir loin.
Soudainement l’éclat d’une lumière fugace se voit au loin.
Il descend quatre à quatre les marches de l’escalier et se rue sur son caporal qui ne dormait pas encore.
— Caporal, j’ai vu une lumière dans le fond de la vallée, en face de la tour, juste au nord.
— Mǐn[4] ! Montre-moi où c’était.
— On ne prévient pas ?
Il lui tape sur l’épaule.
— Je préfère voir d’abord.
Une fois en haut, le caporal Gāo Lín se penche le plus possible pour essayer de distinguer quoi que ce soit dans la nuit.
— Il n’y a rien, Sūn Yǐng... rien du tout.
Le soldat se tait. Il sait bien que la lumière a disparu, mais il ne tient pas à contredire un supérieur.
La nuit est calme. À un kilomètre de la tour où le général Meng Tian a établi son camp, des ombres se faufilent.
— Arghun, viens c’est ici.
Trois hommes s’approchent du bas de la muraille.
— Tu es sûr, Bödüg, qu’il n’y a pas de sentinelles là-haut ?
— Non chef, les hommes de Yesügei ont fait ce qu’il faut pour les attirer plus loin, comme ça nous allons pouvoir finir ce travail.
Bödüg Kerey, cavalier Xiongnu, semble assez nerveux. Il se met à quatre pattes et rampe.
Soudainement, après quelques instants, il ressort du trou.
— Kürüg, ça y est, on a réussi. Apporte les branchages, il faut que notre trouée soit indétectable.
— C’est bien, leur muraille ne leur sert plus à rien.
[1] Un soldat transporte une petite braise ou torche étouffée sous un couvercle perforé, laissant échapper un filet de lumière vers la muraille, à peine visible depuis l’extérieur.
[2] “Vieux Sōng”, surnom respectueux et affectueux, qui souligne l’âge et l’expérience de son serviteur.
[3] Mot insultant que les chinois utilisaient pour désigner les peuples étrangers hostiles, comme les Xiongnus.
[4] Qui pourrait se traduire par “Par tous les dieux !” (semble-t-il, n'étant pas sinophone NdA).
(mardi 9 décembre 2025, sixième Nouvelle “Drapeau pour asservir”)